H ISTORIQUE DU CAODAÏSME
Avant d'expliquer l'origine du Caodaïsme, il serait
utile, pour détruire les légendes qui se colportent sur le compte de la
nouvelle religion, d'éclairer nos lecteurs sur les mots :
1 . Tam Ky Pho Do
(3 ème Amnistie de Dieu)
2 . Cao Dai ou Thuong De (Souverain Suprême)
3 . Thien Nhan
(Œil de Dieu) représentant l'image symbolique de notre Maître Tout-Puissant.
A cet effet, il nous remonter aux annales des
différentes actes religieuses propagées en Chine.
Un message divin du 26 du 4è mois de l'année Binh Dan
(1926) nous prescrivit de nous
documenter dans le Phat Tong Nguyen Ly ou origine du Bouddhisme pour retrouver
l'explication des
caractères Tam Ky Pho Do. Malgré des recherches actives, il ne nous a pas été possible de trouver
ce livre dans les vieilles pagodes bouddhistes auxquelles nous nous sommes adressés.
I
Dans le Hoi Duong Nhon Qua (La Survie et le Karma)
édité au début de l'année 1925 par M. Tran Hanh To de la province de Tan-An,
nous lisons sous le titre Giac Me Ca (Exhortation à la vie religieuse) un
message reçu d'Esprits Supérieurs en Chine, vers l'année Mau Than (1908) et
dont voici la traduction des passages essentiels .
"Du haut de la
Tour sans toit, je contemple, dans un moment d'ennui, l'œuvre du Créateur .
"Sur la Montagne
du Sud, le rideau des pins et des sapins réjouit mes yeux ;
"Tournant mes
regards vers l'Océan du Nord, je vois des poissons qui nagent nonchalants ;
"Puis, revenant
dans mon cabinet solitaire, je révèle la vérité cachée .
"Libre aux
hommes de me croire ou de ne pas me croire .
"Si par une
grâce du Destin, il bénéficient de la 3è AMNISTIE DE DIEU,
"Leurs noms
figureront dix mille siècles au Palais de Pourpre".
II
En ce qui concerne les mots Cao Dai, dont la
traduction littérale est Palais Suprême, on les trouve dans les livres de
prières bouddhiques.
Thuong tau Cao-Dai ou Prières à Cao-Dai comme dans les
commentaires du Dao Duc Kinh (Livre de la Voie et de la Vertu) de Lao Tseu et
dans le Kinh Sam de Quan Thanh De Quan (Message No 81 du Turenne Chinois, Quan
Thanh De des Trois Royaumes de Chine), paru depuis très longtemps et existant
dans toutes les pagodes dédiée au culte de ce Saint Homme.
L'autre part, les mots Cao Dai sont imprimés dans une
édition en caractères chinois de la Société Biblique Britanique et Etrangère,
édition parue en 1913 à Shanghai. Nous y lisons, en effet, au chapitre 94, 22è
alinéa, à peu près ceci :
" O Jéhova ! Tu es bien le Palais Suprême (CAO-DAI) où nous prenons refuge :
Oh Dieu ! Tu es bien la Grosse Pièrre,
derrière laquelle nous nous abritons."
III
Quant à "l'Œil de Dieu", qui matérialise aux
yeux imparfaits des humains l'image du Créateur que nous adorons depuis 1926,
il figure sur la première page du Catéchisme-Album édité par Librairie
Saint-Joseph, Tolba et Simonet, éditeurs (Paris), et existant dans toutes les
Eglises Catholiques.
On y lit, en effet, la définition suivante :
"Dieu est esprit, il ne peut-être vu de nos yeux,
ni par conséquent représenté sur une image. Cet Œil vous rappelle que Dieu est
la souveraine Intelligence, qu'il sait tout et voit tout. On l'encadre du
soleil, car Dieu est le vrai Soleil qui éclaire et réchauffe tout et porte la
vie partout, Dieu est la Lumière Eternelle"
D'autre part, dans son message du 26 Février 1926
Ngoc-Hoang-Thuong-De dit Cao-Dai s'exprime comme suit :
"Ce n'est pas
encore le moment pour vous de savoir pourquoi vous m'adorez par l'image
symbolique d'un Œil. Voici toutefois, en substance, ce que celà signifie :
"L'Oeil est le
moteur du cœur,
"Le maître
souverain de la perception visuelle.
"La perception
visuelle procède du principe intelligent,
"Le principe
intelligent procède du principe divin,
"Le principe
divin, c'est Moi ".
* * *
Quand Dieu se révèla à Moïse, IL lui dit simplement :
"Je suis ce que je suis", sans achever de dire ce
qu'IL est, car dans le langage imparfait des hommes, il n'y a pas de noms qui
puissent l'exprimer. Non seulement, on ne peut, avec le sens limite des mots,
définir l'Être Infini, mais encore on ne peut se faire une idée de sa nature
parce qu'elle dépasse tout les sens, ni de sa forme parcequ'IL n'a pas de
forme. C'est, croyons nous, pour cette raison que le Maître Tout Puissant s'est
fait présenter symboliquement par un "Œil", ne voulant pas, comme IL l'avait fait à Moïse, achever de dire comment IL
est.
Aristote, une des intelligences les plus vastes qui
aient jamais existé, avait également conçu l'idée de ce symbole de l'Être
Suprême. A la question que lui posa Secundus sur la conception de Dieu, il répondit: "C'est le Bien existant par lui-même, une Hauteur invisible, un Être
qu'on ne peut comprendre, un Esprit immortel et qui pénètre tout, UN ŒIL
TOUJOURS OUVERT ( C'est nous qui soulignons.), l'Essence propre de toutes
choses, un Pouvoir qui a plusieurs noms, une Main Toute-Puissante : Dieu est
Lumière, Intelligence et Force".
Ainsi, cet Œil symbolique signifie que Dieu voit tout,
qu'IL est présent partout et à tout instant, témoin de tout les actes bons ou
mauvais de ses créatures. N'est-ce-pas là le symbole parfait de l'Intelligence
Suprême et de la Lumière Divine, au contact de laquelle s'épure la pensée
humaine ?
Puisque rien ne peut échapper à la vigilance et à la
perspicacité de l'Être qui pénètre tout, cet "Œil sacré" que les Caodaïstes voient à chaque
instant sur leur autel, cet Œil qu'ils sentent pénètrer jusqu'au tréfond de
leur âme, cet Œil les juge, les soutient
et les réconforte, les aide et les force au besoin à se tenir dans la voie du
bien.
A ceux qui se livrent à nos dépens à des plaisanteries
faciles ou à des insinuations malvaillantes à propos de l'Œil sacré, nous nous
contentons de dire qu'il convient de n'y attacher que le sens et la valeur d'un
symbole. A une certaine étape de son évolution intellectuelle et religieuse,
l'homme, pour comprendre Dieu, l'a fait à son image. Plus affiné, l'esprit
humain le voit aujoud'hui sous une figuration moin matérielle, plus
synthétique. Peut-être, demain, élevé sur un plan supérieur, lui sera t-il
donné, par la seule puissance de l'abstraction, de concevoir l'Etre Suprême
dans son essence, de le contempler face à face dans toute sa splendeur, sans le
secours de l'art humain, dont toutes les créations, depuis les grossiers
fétiches de l'Afrique jusqu'aux chefs-d'œuvre de la peinture et de la sculpture
modernes, ne peuvent en donner que des images plus ou moins imparfaites.
Revenons maintenant à l'historique de la nouvelle
religion.
Ce fut au début de l'année Binh Dan (1926) que le Caodaisme fit son apparition en
Cochinchine ou plus exactement à Saigon. Mais longtemps auparavant, des Esprits
missionnaires avaient reçu de Dieu l'ordre d'en préparer l'avènement.
En effet, dans une séance de spiritisme qui avait eu
lieu à la pagode "Mieu Noi" située à Ben Cat (Gia Dinh) le 17
du 6è mois de l'année Qui Hoi (30 Juillet 1923), l'Esprit Tao-Quoc-Cuu avait
révélé ce qui suit :
"Tâchez de vous
initier au Dao (Tao) pour n'avoir pas à le regretter. Il est donné rarement aux
humains d'en trouver l'occasion, car le Dao est une chose très précieuse, et
rien au monde ne peut lui être comparé. Vous avez le bonheur et la bonne
fortune de voir le Dao apparaître pour la 3è fois. Si vous en jouissez avant
les autres, c'est que vous y êtes prédestinés. C'est par une grâce du Destin
que le don de la Troisième Amnistie de Dieu (Tam-Ky Pho-Do) vous échoit en
partage. Des Esprits Supérieurs sont venus en mission ici-bas pour le sauvetage
des âmes prédestinées. Vous êtes de celles-là. Il dépend donc de votre foi
agissante d'obtenir le succès".
D'autres messages non moins édifiants reçus :
a) Le 2 Septembre 1923 à la Pagode de Ngoc Hoang
(l'Empereur des Cieux)
à Dakao (Saigon).
b) Le 1er du mois de l'an Qui Hoi (1923) à la Pagode
Cung-Toan-Hoa (Chine), de Thuong De (Souverain Suprême);
c) Le 13 du 8è mois de l'an Qui Hoi (1923) à la même
Pagode, de l'Esprit Ton Ngo Khong;
d) Le 30 du 10è mois de l'an Giap Ty (1924) à la même
pagode, de l'Esprit Confucius;
e) Le 4 du 11è mois de l'an Giap Ty (1924) à la même
pagode, de l'Esprit Thai At,
laissaient pressentir également l'avènement du
Caodaïsme. Il serait fastidieux de les énumérer tous.
Si l'on se reporte à la Bible, on verra que c'est bien
aujoud'hui la Troisième Révélation qui s'est manifestée de la part de Dieu( les
1ère et 2è Révélations furent personnifiées dans Moïse et le Christ en
Occident, et dans Çakya-Mouni et Laotseu en Orient).
Le Christ n'a-t-il pas dit: "Beaucoup de choses que je vous dis, vous ne pourrez les comprendre,
et j'aurais beaucoup d'autres à vous dire que vous ne comprendriez pas; c'est
pourquoi je vous parte en paraboles; mais plus tard, je vous enverrai le
Consolateur, l'Esprit de Vérité, qui rétablira toutes les choses et vous les
expliquera toutes". Jean, chap. XIVXVI; Mathieu chap. XVII).
Ce fut, avons-nous dit, au début de l'année Binh-Dan
(1926) que le Caodaïsme fut définitivement fondé. Mais depuis six ans dejà, un
homme adorait le Grand
Maître Cao Dai: M. le
Phu Ngo Van Chieu, alors en service au 2è Bureau du Gouvernement de la
Cochinchine.
Délégué administratif, en 1919, au poste de Phu Quoc,
île située dans le Golfe de Siam, M. Ngo Van Chieu menait une vie de haute
sagesse, conforme aux règles rigoureuses de la Doctrine Taoiste. De temps en
temps, dans cette localité isolée si propice à la vie religieuse, il s'adonnait,
à l'aide de jeunes médiums de 12 a 15 ans, à l'évocation des Esprits
Supérieurs (Cau Tien) de qui il recevait les instructions nécessaires à son
évolution spirituelle. Parmi les Esprits communicants, il s'en trouvait un qui
se nommait Cao Dai et s'intéressait de façon particulière au Phu Chieu.
Au début, ce nom souleva l'étonnement général des
personnes présentes, parce qu'à leur connaissance aucun livre religieux n'en
avait fait mention. Néanmoins, le Phu Chieu, dont la perspicacité faisait
l'admiration de ses camarades, crut y reconnaître un surnom de Dieu à cause des
révélations et des enseignements d'une haute portée philosophique qu'il en
avait reçus à maintes reprises.
Ayant demandé à Cao Dai la permission de l'adorer sous
une forme tangible, il en reçut l'ordre de le représenter par un œil
symbolique.
Telle fut la conversion du premier caodaïste à la
nouvelle religion qui devait, six années plus tard, s'implanter à Saigon.
Bientôt, les fonctions administratives du Phu Chieu le rappelèrent à la
capitale, où il conquit quelques prosélytes à la Foi nouvelle. Mais quittons
pour le moment ces premiers convertis pour montrer aux lecteurs la manière dont
le Grand Maître recruta ses médiums.
* * *
C'était au milieu de l'année At Suu (1925), un petit
groupe de secrétaires annamites appartenant à diverses administrations à
Saigon, se délassaient chaque soir, en faisant du spiritisme. Il se servaient à
cet effet de la "table frappante". Les premiers essais furent
médiocres. Mais à force de patience et d'entrainement , ils obtinrent des
résultats positifs. Aux questions posées aux Esprit, soit en vers, sois en
prose, ils recevaient des réponses surprenantes. Leurs parents ou amis défunts
se manifestèrent pour leur parler d'affaires de famille et leur conseiller en
même temps l'abnégation. Ces révélations sensationnelles leur apprirent ainsi
l'existence d'un monde occulte.
Toutefois un des Esprits communicants se faisait
remarquer particulièrement par son assiduité et ses enseignements d'une haute
portée morale et philosophique. Cet Esprit qui signait sous ce pseudonyme "AAÂ" ne voulait pas se faire connaître, malgré les prières des assistants.
Bientôt, d'autres secrétaires annamites vinrent grossir ce petit groupe de
spirites-amateurs. Les séances devinrent alors plus sérieuses et plus
régulières. Comme l'emploi de la "table frappante" n'était pas commode, l'Esprit en
question la fit remplacer par la "corbeille à bec". Avec cet appareil qui permet
l'écriture directe, les communications devinrent naturellement plus rapides et
moins fatiguantes pour les apprentis médiums.
Le 24 Décembre 1925, à l'occasion de la Noël, l'Esprit
guide qui s'était obstine jusque-là à garder l'anonymat, se révéla enfin aux
néo-spirites comme étant L'Être Suprême venant sous le nom de Cao Dai pour
enseigner la Vérité au pays d'Annam. S'exprimant en Annamite. Il dit en
substance :
"Réjouissez vous
de cette fête. C'est l'anniversaire de ma venue en Europe pour enseigner ma
doctrine. Je suis très heureux de vous voir, ô disciples pleins de respect et
d'amour, à mon égard. Cette maison (Maison d'un des médiums.) aura toutes mes
bénédictions. Les manifestations de ma Toute-Puissance vous inspireront encore
plus de respect et d'amour à mon égard ..."
Dès lors, le Grand Maître initia ses disciples à la
doctrine nouvelle.
Tel fut le recrutement des premiers médiums chargés de
la réception des messages divins.
Conversion de M. Lê Vän Trung, Entrepreneur des
services publics , ancien membre du Conseil Colonial de la Cochinchine et du
Conseil du Gouvernement de l'Indochine.
C'était également en 1925 M . Le Van Trung habitait à
Cholon-Ville. Adonné à diverses entreprises, dans le tumulte de cette ville
vouée au culte de l'argent, il avait l'esprit complètement éloigné de la
religion. Un soir, sur l'invitation d'un de
ses parents, spirite convaincu et appartenant à une
secte religieuse dite "Minh Ly" (Cette secte est, comme celle de
Minh Tan, Minh Thien, née du spiritisme depuis ces dernières années) à Saigon,
il se rendit à une séance médiumnique qui devait avoir lieu dans la banlieue à
Cho Gao.
A cette réunion, ce fut l'Esprit Ly Thai Bach qui se
manifesta. Prenant à part M. Trung, il lui révéla son origine spirituelle et
lui annonça en même temps sa prochaine mission religieuse. Il l'exhorta alors à
se soumettre aussitôt au régime imposé par la foi nouvelle. Touché par la
grâce, M. Trung changea sans hésiter de vie. Soutenu par sa foi il eut le
courage de cesser aussitôt de fumer l'opium et de suivre le régime végétarien; il abandonna également ses
entreprises pour pouvoir se consacrer entièrement à la religion.
La conversion de cet homme, hier encore si attaché aux
biens et aux jouissances de la vie, est si frappante qu'on peut se demander si
les séances spirites organisées jusque-là à Cho Gao, n'avaient pas été
inspirées par les Esprits missionnaires dans l'unique but de ramener M. Le Van
Trung dans la voie de la Loi. En effet, lorsque celui-ci eut prit la résolution
de vivre selon la foi nouvelle qu'il avait embrassée, ils ordonnèrent la
dispersion du groupe spirite, au grand étonnement et à la profonde affliction
de ses membres.
A Saigon, le Grand Maître, jugeant le moment venu,
rapprocha ses médiums de M.Le Van Trung. Il envoya alors deux de ceux-ci (MM.
Cu et Tac) chez le nouveau converti, avec ordre d'y organiser une séance au
cours de laquelle,il lui donnerait des instructions.
M.Trung, qui ne connaissait pas ces médiums, accepta
cependant leur proposition lorsqu'il eut appris les motifs de leur démarche.
Une séance évocatoire eut lieu. Le Grand Maître, entre
autres enseignements, annonça à M.Trung sa grande mission prochaine dans la
nouvelle religion qu'il allait fonder pour sauver l'humanité.
Cette révélation confirmait les allusions des
divers messages spirites que M. Trung
avait reçu à Cho Gao avec d'autres médiums. Elle fortifia sa conviction et
l'encouragea à se consacrer sans réserve aux pratiques religieuses.
Quelque temps après, le Grand Maître envoya MM Trung,
Cu et Tac auprès du Phu Chieu, qui devait les guider dans la voie religieuse en
qualité de frère aîné. Celui-ci qui, de son côté, en avait été instruit par le
Grand Maître, leur fit le plus cordial accueil, il les mit immédiatement en
contact avec ses premiers coreligionnaires. Le noyau caodaïste fut ainsi formé,
qui comprenait une douzaine de membres tous de culture française et employés
pour la plupart dans diverses Administrations à Saigon.
La faveur et le désintéressement de ces pionniers de
la première heure attirèrent bientôt à eux un nombre d'adhérents de plus en
plus élevé. La religion Caodaïste sortit alors de son cercle restreint pour se
répandre dans le peuple au début de l'an BINH DAN (1926).
M. le Phu Chieu, habitué à la solitude, fut contrarié
par l'affluence des adeptes, qui l'inquiéta. Fonctionnaire conscient de ses
devoir, il prit la résolution de se tenir désormais à l'écart de ce grand
mouvement religieux. M Le Van Trung fut alors désigné par le Grand Maître pour
le remplacer vers fin Avril.
LES PREMIERS
ORATOIRES
Les séances spirites continuèrent de plus en plus
nombreuses chez des particuliers, et principalement dans les oratoires
organisés, dans chacun des centres suivants : Cholonville, Cangiuoc, Locgiang,
TanDinh, ThuDuc et CauKho Deux médiums furent affectés à chaque oratoire pour recevoir
les renseignements du Grand Maître. L'admission des nouveaux adeptes y fut
également décidée. Les adhésions vinrent en masse; elles sélevèrent même à
plusieurs certaines d'inscriptions nouvelles à chaque séance.
LA DÉCLARATION
OFFICIELLE DU CAODAÏSME
La nouvelle religion prit très rapidement de
l'extension, tant elle fut reçu avec enthousiasme surtout par le peuple.
Soucieux d'agir au grand jour et de se tenir dans les limites de la plus
stricte légalité, ses dirigeants en firent une déclaration officielle signée de
28 personnes, qu'ils adressèrent à la date du 7 Septembre 1926 à M.le
Gouverneur de la Cochinchine A cette déclaration, fut jointe aussi une liste
d'adeptes comportant les signatures des 247 adeptes présents à la cérémonie
ayant consacré l'existence officielle du Caodaïsme.
LA PROPAGANDE
Après avoir fait cette déclaration, à laquelle le
Gouvernement local avait réservé un acceuil courtois,les dirigeants de la
"Grand Voie" organisèrent des missions de propagande dans
l'intérieur.
Celle-ci étaient au nombre de trois dont une, pour les
provinces de l'Est, une pour celles du Centre et une pour celles de l'ouest.
En moin de deux mois, plus de 20.000 personnes, parmi
lesquelles de nombreuses notabilités indigènes, se convertirent à la nouvelle
religion. Ce fut grâce au spiritisme, et surtout à l'Infinie Bonté de Dieu, qui
se manifesta toujours à chaque prière invocatoire et dont les messages eurent
une influence décisive sur les assistants, que le Caodaïsme doit ces
conversions en masse.
Ce grand succès est dû également à la forme du nouveau
culte, lequel n'a rien de contraire à ceux des principales religions pratiquées
dans le pays.
LA FÊTE DE
L'AVÈNEMENT DU CAODAÏSME
Dès le 10è jour du 10è mois (14-11-26), les tournées
de propagande furent interrompues. Tous les efforts des dirigeants furent
concentrés sur la fête de l'avènement du Caodaïsme. Celle-ci eut lieu les 14,15
et 16 du 10è mois de l'année Binh Dân (18,19 et 20 Novembre 1926, dans la
pagode "Tu Lam Tu" située à Go Ken (Tây Ninh). Le
Gouverneur Général de l'Indochine ainsi que le Gouverneur de la Cochinchine et
les grands fonctionnaires européens et indigènes y furent invités.
Célébrée avec solennité, cette fête réunit un nombre
considérable d'adeptes accourus de toutes les provinces de la Cochinchine. Elle
attira également des milliers de profanes venus en curieux aussi bien qu'en
observateurs. La présence de M.le capitaine Monet, un grand spirite français, y
fut également remarquée.
Ce fut pendant cette fête que le Sacerdoce Caodaïste
fut institué et que le nouveau Code religieux fut établi et promulgué.
LE SIÈGE DÉFINITIF DU
CAODAÏSME
Le Tu Lam Tu est une pagode bouddhiste nouvellement
construite par le Hoa Thuong Giac Hai de Cho Gao (Cholon), qui l'avait affectée
à la nouvelle religion, à laquelle il avait été converti. Mais après la fête, les fidèles bouddhistes, qui avaient
fourni les fonds pour l'édification de ce temple et qui n'avaient pas été
consultés sur sa désaffectation,
réclamèrent son retour à sa destination primitive.
D'autre part,l'expérience avait démontré que cette
pagode était trop petite et que le terrain sur lequel elle était bâtie était
trop exigu pour permettre d'installer convenablement le Siège de la nouvelle
religion naissante, appelée à un grand avenir .
Sur les indications d'un esprit supérieur, le terrain
sur lequel se trouve actuellement le Temple provisoire, fut donc choisi et
acheté pour y fixer définitivement le Saint Siège Caodaïque. Située au village
de Long Thành, province Tây Ninh, il est assez vaste (100 Ha . environ) pour répondre aux besoins actuels et futurs.
Le transfert du Temple de Go Kén à Long Thành eut lieu
en Mars 1927. Le nombre des adeptes continuait à augmenter considérablement. Le
mouvement des pélerins au nouveau temple provisoire mérite d'être noté :
c'était par milliers qu'on les y recevait chaque jour.
Comme toutes les autres religions à leur début, le
Caodaïsme a aussi des adversaires dont les critiques, souvent trop passionnées,
ne sont pas toujours dictées par un esprit suffisamment objectif.
Cependant, les dirigeants caodaïstes, obéissant aux
instructions du Grand Maître
s'efforcent de se maintenir et de se perfectionner
dans la Grande Voie, en ayant uniquement en vue de bien moral et spirituel de
l'humanité. C'est la seule réponse qui leur soit permise aux attaques dont ils
sont l'objet, car tout vrai Caodaïste réserve à lui même sa vérité.
Enfin, après quatre années d'existence, le Caodaïsme
compte déjà un demi million d'adeptes. Et malgré les multiples obstacles semés
sur son chemin, il continue toujours sa marche triomphante vers le but que Dieu lui assigne: la régénération de l'humanité dans la paix
universelle.
LE CAODAÏSME
Ses Buts - Sa
Doctrine
Le Dai Dao Tam Ky Pho Do (3e Amnistie de Dieu en Orient) appelé
Caodaïsme en français, est une Religion fondée sur les enseignements données
par Ngoc Hoang Thuong De (DIEU) qui prend comme fondateur de la religion
nouvelle, le nom de Cao Dai (Le Très-Haut).
Il prêche la pratique de la doctrine rénovée, en grande
partie tirée de la fusion des trois principales et plus vieilles religions de
l'Orient Le Bouddhisme, le Taoïsme, le Confucianisme.
Dans un message transmis le 13 Janvier 1927, en
présence de quelques Français, l'Esprit Ly Thai Bach, un des Ministres de DIEU,
exposa ainsi la nouvelle doctrine.
Parlant aux officiants annamites :
"Le Grand Maître
me confère, leur disait-il la mission de donner quelques instructions sur le
Dai Dao à ses adeptes, qui sont vos aînés, et qui sont à cette séance, vos
invités".
Puis s'adressant aux assistants français :
"Loin
d'exploiter votre crédulité par de puériles sorcelleries ou des prophéties
charlatanesques, je tiens particulièrement, chers frères, à vous faire
comprendre l'unité de cette Religion, la seule capable de ramener la Paix
universelle.
La doctrine de cette
Religion est répandue actuellement sur plusieurs points du globe, sous
différentes formes.
Combattre l'hérésie,
semer parmi les peuples l'amour du bien et des créatures de DIEU, la pratique
de la vertu; apprendre à aimer la justice et la résignation ; révéler aux
humains les conséquences posthumes de leurs actes, tout en assainissant leur
âme, tel est l'idéal du Dai Dao.
Les Saintes Doctrines
des diverses religions sont mal pratiquées. L'ordre et la paix du temps jadis
s'effacent. La loi morale de l'humanité est trahie. Pour les irréfléchis et les
sceptiques. DIEU n'existe que par le mot. Ils ignorent qu'en ce lieu suprême,
règne un Personnage. Maître souverain de tous les êtres, de tous les événements
de l'Univers et de toutes les destinées humaines. Ils marchent aveuglement sur
le chemin du péché sans se soucier de la punition qui leur sera réservée.
Chers frères, le
Christ misécordieuxet venu parmi vous pour vous tracer le chemin du bien.
Tâchez de le suivre pour avoir plus tard la paix de l'âme ; avancez chaque jour
d'un pas alerte dans l'amour de DIEU. Unissez vous, aimez vous les uns les
autres, aidez vous mutuellement, c'est la loi divine.
En ce monde, où
chacun est condamné à subir son purgatoire,si l'on cherche à semer partout
misères et souffrances, on risquera d'être entrainédans ce torrent inferral où
le méchant va briser sa vie et souiller son âme".
D'autre part, pour réaliser l'unité fraternelle des
religions, le Caodaïsme pratique la plus large tolérance envers toutes les
formes de la loi religieuse,se réservant toutefois de les ramener,par la
persuasion, à l'Unité primordiale.
C'est dans ce but que le Maître Suprême a entrepris,
dès la naissance du Caodaïsme, la fusion du Boudhisme, du Taoïsme et du
Confucianisme, dont il recommance à ses fidèles de vénérer les fondateurs à
l'égal du Christ.
Voici comment le Grand Maître explique la nécessité de
fusionner les diverses religions, dans un message dont nous empruntons, sauf la
dernière phrase, la belle traduction à M.G.Coulet.
Autrefois les peuples ne se connaissaient pas et
manquaient de moyen de transports. Je fondais alors, à différentes époques,
cinq branches de la Grand Voie (Dai Dao):
1 . Nhon Dao : le Confucianisme,
2 . Than Dao : le Khuong
Thai Cong, Culte des Génies,
3 . Thanh Dao : le
Christianisme,
4 . Tien Dao : le Taoïsme,
5 . Phat Dao
: le Bouddhisme,
chacun basé sur les us et coutumes des races appelées
particulièrement à les pratiquer.
Aujourd'hui, toutes les parties du monde sont
explorées : "l'humanité qui se connait
mieux, aspire à une paix réelle.Mais à cause de la multiplicité même de ces
religions, les hommes ne vivent pas toujours en harmonie les uns avec les
autres. C'est pourquoi j'ai décidé de réunir toutes ces religions en une seule,
pour les ramener à l'unité primordiale.
Au sur plus, la
sainte doctrine de ces religions a été, à travers les siècles, de plus en plus
dénaturée par ceux-là mêmes qui étaient chargés de la répandre, à tel point que
j'ai prit aujourd'hui la ferme résolution de venir Moi-même vous indiquer la
voie à suivre".
Tel est dans ses grandes lignes, l'exposé doctrinal de
la nouvelle religion, exposé sur lequel nous reviendrons en détail un peu plus
loin.
Voués depuis quatre ans sans relâche à la propagande
de la nouvelle doctrine, à travers des difficultés de tous ordres, nous sommes
parvenus à conquérir à la foi caodaïste un demi million (en 1930) environ de
fidèles de différentes nationalités. Ce magnifique résultat, qui ne peut que
nous encouager à persévérer dans notre mission, n'a pu être obtenu que grâce à
l'Infinie Bonté de Dieu, notre Grand Maître et notre Père à Tous.
LES PRINCIPES
FONDAMENTAUX
DE LA DOCTRINE
CAODAÏSTE
Cao-Dai, disions-nous, est simplement un nom symbolique
de l'Être Suprême qui, pour la troisième fois, s'est révélé en Orient (voir
l'Historique du Caodaïsme).
Au lieu de venir, comme pour les deux premières
révélations, sous une forme humaine, Dieu, adaptant son enseignement aux
progrès de l'esprit humain, plus affiné qu'autrefois, s'est aujourd'hui
manifesté par voie de médiumnité, ne voulant accorder à aucun mortel, fût
il un sage ou un initié, le privilège de
se poser en fondateur du Caodaïsme. C'est ce qui constitue le caractère
d'universalitéde ce dernier. En effet, toute religion, soumise à l'autorité
'd'un fondateur humain, a été reconnue impropre à devenir universelle; car ses
adeptes attachés à la personnalité de ce fondateur, se refusaient à accepter
les vérités proclamées par d'autres fois religieuses à l'égard desquelles ils
témoignaient une intolérance parfois regrettable.
Si la doctrine Caodaïste est,en grande partie tirée de
celle des anciennes religions de
l'Orient c'est que, pour réaliser l'unité religieuse, elle s'en assimile les
purs principes reconnus comme étant des
vérités éternelles, l'expression de la Loi Divine. Or, aux vérités éternelles,
à la Loi Divine, le Caodaïsme ne peut que conformer ses dogmes et ses
principes. Mais là où certaines vérités sont déformées par les conceptions
superstitueuses de l'ignorance, la nouvelle religion se charge de les rétablir
dans leur véritable sens.
Ainsi présentée, la doctrine Caodaïste tend, non
seulement à concilier toutes les convictions religieuses, mais encore à
s'adapter à tous les degrés de l'évolution spirituelle.
Au point de vue moral, elle rappelle à l'homme ses
devoirs envers lui-même, envers sa famille, envers la société qui est une
famille élargie, puis envers l'Humanité, la famille universelle.
Au point de vue philosophique, elle prêche le mépris
des honneurs, de la richesse, du luxe, en un mot l'affranchissement des
servitudes de la matière pour chercher, dans la spiritualité, la pleine
quiétude de l'âme.
Au point de vue culturel, elle recommande l'adoration
de Dieu, notre Père à tous, et la vénération des Esprits Supérieurs, qui
constituent l'Auguste Hiérarchie occulte. Admettant le culte national des
ancêtres elle proscrit cependant les offrandes carnées, ainsi que l'usage des
papiers votifs.
Au point de vue spiritualiste, elle confirme d'accord
avec d'autres religions et avec les systèmes de philosophie spiritualiste et
psychique, l'existence de l'âme, sa survivance au corps physique, son évolution
par réincarnations successives, les conséquences posthumes des actions humaines
réglées par la loi du karma.
Au point de vue initiatique, elle communique à ceux
des adeptes qui en seront dignes, les enseignements révélés qui leur
permettront par un processus d'évolution spirituelle, d'accéder aux
ravissements de la béatitude...
Nous pensons avoir, à grands traits, exposé la
nouvelle doctrine. Nous convions tous ceux que cette doctrine aura satisfaits,
à se joindre à nous pour travailler en commun à l'œuvre de fraternisation
spirituelle de toutes les religions.
LES ADEPTES DU CAODAÏSME
et le CORPS
SACERDOTAL
Les adeptes du Caodaïsme sont de deux degrés, le "thuong thua" (degré supérieur), et le "ha thua" (degré inférieur). Rentrent dans
le premier degré, tous les religieux proprement dits ; ils peuvent être
digitaires ou simples adeptes. A ce titre, ils sont astreints à laisser pousser
leur barbe et leurs cheveux, à suivre un régime d'alimentation exclusivement
végétarien, à s'interdire le luxe et les relations sexuelles. Leur vie
affranchie des servitudes de la matière, est entièrement vouée au service de la
religion.
Les adeptes du second degré comprennent la masse des
croyants, qui continuent à vaquer à leurs occupations normales; leur devoir
religieux consiste à pratiquer quotidiennement le culte et à observer les
règles de conduite prescrites par le Nouveau Code religieux (Tân luat). Les uns
comme les autres sont astreints aux "Ngu gioi cam" (les panchashila) interditions
tirées de la morale bouddhique
et qui commandent de:
ne pas tuer, ne pas être cupide, ne pas commettre d'acte de luxure, ne pas
faire grande chère, ne pas pécher en paroles.
En ce qui concerne le régime d'alimentation que
doivent suivre les adeptes du second degré, il leur est prescrit un végétarisme
graduel consistant à s'abstenir des aliments carnés un nombre déterminé de
jours en mois.
Ainsi, ils débutent par le "soc vong", régime temporaire des deux jours;
puis passent successivement au "luc trai", régime des 6 jours, et au "thap trai" régime des 10 jours.
Le Caodaïsme admet dans son sein toutes les bonnes
volontés sans distinction de race, ni de rang social. Le simple dan y coudoie
fraternellement le Doc phu su. Les adeptes se distinguent seulement par leurs
mérites religieux, sur la base desquels est établie la hiérarchie nécessaire à
la conduite de la masse des fidèles.
A l'occasion de la fête de l'avènement du Dai Dao, qui
eut lieu les 18, 19 et 20 Novembre 1926, il fut formé conformément aux
communications de Dieu, un corps sacerdotal qui comprend numériquement:
1 Giao Tong,
3 Chuong Phap
3 Dau Su
36 Phoi Su
72 Giao Su
3000 Giao Huu et des Le Sanh en nombre illimité.
Leurs missions respectives sont déterminées dans le
code religieux que le lecteur trouvera plus loin.
LE CULTE CAODAÏSTE
Ses Rites - Ses
Symboles
De la conscience que l'homme est tenu à des devoirs
envers DIEU qui l'a créé, est né le sentiment l'adoration. L'ensemble des actes
par lesquels nous témoignons à Dieu ce sentiment d'adoration, constitue ce que
nous appelons le culte. Il en est de même du culte Caodaïste. Celui-ci se
pratique chaque jour, dans les oratoires comme dans les maisons privées, en
quatre temps (tu thoi): à 6 heures, à midi, à 18 heures, puis à minuit.
Prosternés devant l'autel Divin, dans l'élan de notre âme vers l'Être Suprême,
nous commençons par accomplir le rite de l'offertoire de l'encens (niem huong).
Vient ensuite celui de l'ouverture des prières (khai kinh) dont la formule peut
être ainsi traduite :
"Au-dessus de
l'Océan de la douleur humaine, dont l'immensité se perde entre le ciel et
l'eau, déjà l'Astre du jour point à l'Orient.
"L'Auguste
Instructeur Thai Thuong Duc Ong (Lao Tseu) a eu le mérite d'aider au salut de
l'Humanité.
"Les Trois
Religions enseignent comme base de leurs doctrines, la pratique du bien et de
la vertu.
"Le Sage
Confucius a nettement tracé la voie du Juste Milieu.
"Le
Miséricordieux Bouddha a prêché la dévotion et la charité.
"La doctrine
Taoiste a prescrit le culte du vrai et la discipline du caractère.
"Ainsi un même
tronc a donné naissance à trois branches similaires.
"Que l'Homme qui
se pénètre de cette vérité profonde, se purifie le cœur pour réciter les
saintes prières".
Ces formalités remplies, nous nous mettons à entonner
en chœr un cantique à la Gloire de Dieu puis trois autres en l'honneur des
Trois Saints (Conficius, Laotseu, Bouddha).
Tel est, dans toute sa simplicité, le rite du culte
quotidien. Quant à l'office divin célébré dans les oratoires, les jours de
grande cérémonie, il comporte un cérémonial plus imposant.
Les dignitaires du sexe masculin, dans leur costume de
cérémonie dont la couleur est déterminée par la branche à laquelle ils
appartiennent (La couleur jaune symbolise le Bouddhisme, la couleur bleue, le
Taoisme, la couleur rouge, le Confucianisme), se prosternent par rangées
transversales, sur la natte étendue devant l'autel divin, auquel ils font face.
A leur droite et devant l'autel de Quan-Thanh De Quan, sont agenouillés, sur
une autre natte, les adeptes du même sexe (Nam phai), tous vêtus de blanc avec
sur leur tête, le traditionnel turban noir.
A gauche et faisant face à l'autel de Quan Am Bo Tat,
sont prosternées, dans les mêmes conditions que leurs coreligionnaires de
droite, les adeptes du sexe féminin (Nu phai) également vêtues de blanc; quant
aux dignitaires, elles se distinguent des simples adeptes par la forme spéciale
de leur costume.
Les prières sont partout les mêmes; mais ici, elles
sont accordées à l'harmonie musicale et récitées d'après les commandements
proférés par des maîtres de cérémonie (Le Sanh).
* * *
On nous reproche de nous absorber inutilement dans de
longues prières, alléguant que le temps consacré à cette obligation devrait
être mieux employé.
Nous reconnaîtrions volontiers le bien-fondé de ce
reproche, si les prières que nous pratiquons consistaient en une récitation
monotone de mots intelligibles d'où serait exclue la pensée du cœur. Mais
pratiquée avec intelligence et ferveur, énergique et remplie d'onction, la
prière, acte de foi, est non seulement un acte d'adoration, mais encore une élévation
de notre cœur, un élan de notre âme vers l'Être Suprême.
Dans l'état actuel de leur évolution religieuse, la
masse des fidèles caodaïstes ont besoin d'acquérir une volonté telle qu'elle
leur permettre de résister aux tensions matérielles en toutes les
circonstances,et de s'entourer d'une ambiance pure, qui écarte d'eux les idées
mauvaises et les influences inférieures de l'espace.
Cette volonté, pour être efficace, doit être soutenue
par la foi. Or la pratique répétée de la prière affermit en eux cette foi si
précieuse, en même temps qu'elle leur permet
de s'attirer, par la pureté de leur cœur, les forces protectrices de
l'Au-delà.
D'autre part, il n'ya rien de plus ravissant, de plus
sublime que de rentrer en -dedans de soi-même, oubliantchaque jour, pour
quelques heures de prière fervente, les affaires et le monde pour élever sa
pensée vers Dieu avec Qui on traite seul à seul.
Tel est le but de la prière, qui doit être
journellement pratiquée par les simples fidèles. Demain, élevés à un degré supérieur
d'évolution, ils sauront la ramener à sa forme abstraite, intérieure : la
méditation
Au point de vue invocatoire, nous prions pour les
personnes malades, malheureuses, pour qui nous demandons à Dieu, non la
jouissance d'un bien matériel, d'un intérêt personnel, mais le prompt retour à
la santé, ou la faveur d'un appui moral, occulte, leur permettant de subir,
sans faiblesse, une épreuve ou une conséquence karmique.
Nous prions également pour les esprits souffrants,
malheureux, sur qui nous appelons la miséricorde divine.
Ainsi faite, la prière constitue l'une des pratiques
nécessaires au salut des âmes.
Le culte caodaïste, outre qu'il constitue un acte
d'adoration, renferme un symbolisme qu'à titre de simple indication, nous
allons expliquer sommairement à nos lecteurs.
La disposition de l'autel, tel que l'a décrit
M.G.Coulet, n'est que le symbole de la fusion dans l'unité des cinq branches de la Grande Voie (Ngu Chi Dai Dao). Mais les objets
cultuels, les offrandes, etc...portent un cachet secret, un sens symbolique.
LES OBJETS CULTUELS.-
Au milieu de l'autel, est tenu constamment allumée une lampe à verre
sphérique (Thai Cuc Dang) symbolisant la monade Universelle (Thai Cuc).
A l'origine des âges, l'Univers, croyons-nous, était
constitué par la Monade, qui est l'Âme Universelle, la Forme Non-Manifestée de Dieu.
Par ses manifestations, la Monade présenta
successivement ses deux Aspects mâle et
fermelle (Luong Nghi) (C'est, d'après les théosophes, la première grande
séparation entre l'Esprit et la Matière) représentés sur l'autel par deux feux
allumés (Luong Nghi Quang).
LES OFFRANDES.- Les offrandes de fleurs,
d'alcool et de thé symbolisent respectivement les trois éléments constitutifs
de l'être humain: le Tinh, le Khi et le Than.
Le Tinh, ainsi que son nom l'indique, est l'essence de
toutes les matières, le sperme cosmique, sans lequel aucune vie ne saurait se
manifester. C'est l'énergie sexuelle de l'homme et de l'animal, la vertu
germinative de la plante. Par son évaporation, le Tinh, qui réside dans
l'homme, constitue la partie grossière du périsprit. Il est au corps
périsprital ce que la chair est au corps physique.
Le Khi, qui litéralement veut dire souffle, air, est
chez l'homme la santé, la force, l'énergie vitale. C'est, dans le périsprit,
l'agent qui unit l'âme au corps physique qu'il vivifie.
Le Than, principe intelligent, est double chez l'être
humain : le mental supérieur (duong-than ou hon) est l'Esprit divin dans
l'homme ; le mental inférieur (âm-thân ou phach) est la partie la plus subtile
du périsprit.
Convertir l'énergie sexuelle en énergie vitale (luyen
tinh hoa khi) l'énergie vitale en énergie mentale (luyen khi hoa than),
l'énergie mental en force spirituelle (luyen than huon hu), tel est le
processus de la purification mystique des trois éléments constitutifs de l'être
humain.
Quant aux bâtons d'encens que nous brûlons à chaque
cérémonie, ils sont invariablement au nombre de cinq. Or, ce nombre symbolique
représent les cinq
degrés de l'Initiation:
1. - Gioi huong : la pureté (Shila)
2. - Dinh huong : la méditation (Dhyna)
3. - Hue huong : la sagesse (Prajna)
4. - Tri kien huong : la connaissance
supérieure (Djnana)
5. - Giai thoat huong : la libération
karmique (Apavarga).
Pour être admis au seuil de l'Initiation, la première
condition pour l'adepte est la pureté sous toutes ses formes: pureté du corps,
de l'acte, du langage,de la pensée.
Une fois le seuil franchi, il s'applique à la
méditation. Par cet exercice spirituel, l'adeptedont la pensée et les sensations
s'isolent du monde des sens, élève son âme vers le Soi Supérieur, avec lequel
il la met en rapport intime. Dans le tête-à-tête de ce receuillement intérieur
porté jusqu'à la plus complète abstraction et où l'âme humaine cherche à
s'identifier avec l'Âme universelle, les vérités luisent peu à peu dans
l'esprit de l'adepte sans que rien au monde ne puisse le leurrer d'apparences
illusoires.
A un plus haut degré d'ascension, il sent en son être
le plein éveil de la connaissance supérieure, qui lui fait percevoir toutes les
vérités éternelles et embrasser, sans le
moindre effort, l'ensemble du passé et de l'avenir. Dans cet état de suprême
sagesse, il peut contempler, sans en être ébloui, la Lumière Divine, lumière
qui purifie, illumine et béatifie. Devant lui, s'ouvre alors la voie du salut :
la libération karmique.
LE CAODAÏSME et LA
LIBERTE DE CONSCIENCE
L'Homme, à quelque nation et à quelque classe sociale
qu'il appartienne, se reconnaît-il le droit de penser selon sa propre intuition
? Certes, toutes les institutions démocratiques y répondent par
l'affirmative.Il faut reconnaître cependant que la conquête de ce droit a coûté
à l'homme plus d'un sacrifice. Le célèbre philosophe Italien Giordano Bruno fut
brûlée à Rome pour avoir proclamé la liberté de la pensée. Son sublime
dévouement à la cause démocratique est un bel exemple pour les penseurs de tous les pays; ainsi, s'établit dans le monde la
libre pensée, mère de la tolérance.
L'Intolérance, on le sait, a été la cause d'affreux
conflits, d'abominables persécutions, qui remplissent en lettres de sang, les
pages de l'Histoire des Religions.
Il est des moments de l'esprit humain où le besoin de
croire à la Divinité devient une nécessité impérieuse. L'homme, dès qu'il est conscient de son origine céleste et du but de ces
pérégrinations terrestres, cherche, selon la foi, son salut dans la doctrine
qu'il embrasse. Il ne demande qu'à adorerson Dieu dans la paix et le silence et
dans la mesure compatible avec le maintien de l'ordre public. Ne serait-ce pas
un crime de troubler sa conscience ?
A son début, le Caodaïsme, malgré la neutralité
administrative pour laquelle nous tenons à rendre un respectueux hommage au
Gouvernement local en la personne de M.Blanchard de la Brosse, fut l'objet
d'attaques passionnées de la part de ses adversaires et de vexations souvent
tracassières de celle de certains agents administratifs trop portés, hélas ! à
devancer ou à mal comprendre les ordres de leurs chefs.
Avec la sérénité de l'âme, qui n'a rien à se
reprocher, le Caodaïsme répondit aux uns comme aux autres par le silence et
l'humilité. C'est là sa faiblesse et sa force; c'est aussi sa ligne de conduite
dont, à aucun prix, il ne se départira.
Il fait mieux encore : il respecte toutes les
croyances d'autrui quand ces croyances ne sont pas de nature à conduire au
fanatisme et à l'hérésie. Sans être
polythéiste de fait, il l'estpar principe, car en dehors de l'adoration
officielle du Dieu Suprême, il permet à ses adeptes la libre vénération
d'autres dieux qui conquièrent leur cœur. Si parfois, dans des circonstances
exceptionnelles, il lui arrive de reprocher aux pratiquants de certaines
religions d'avoir dénaturé la sainte doctrine de leurs fondateurs, il se garde
de prononcer une parole tant soit peu désobligeante à l'encontre de ces
derniers, qu'il considère, en principe, comme étant de haute émanation divine.
Enfin, le Caodaïsme ignore l'esprit étroit de race et
les patries terrestres, qu'il confond dans l'Unité divine qui embrasse tout
l'univers. Il admet comme universelle toute religion fondée sur les révélations
de la conscience et du cœur ou sur la nature psychique de l'individu et sur les
sentiments d'amour et de solidarité de la société humaine. Il tend ainsi à
synthétiser tous les systèmes religieux et philosophiques, auquels il emprunte
les enseignements qui touchent de plus près à la vérité pour en former un corps
de doctrine capable de satisfaire au besoin de certitude métaphysique des âmes
contemporaines...
Ces considérations exposées, il nous est permis
d'espérer que grâce au Caodaïsme et aux autres systèmes d'éclectisme, les deux
courants si opposés de pensées d'Orient et d'Occident se rencontreront un jour
dans une doctrine commune, d'où découleront un amour et une confiance
réciproques entre les deux races qui, jusqu'ici, se croyant différentes à cause
de la couleur de leur épiderme, ont le grand tort de nourrir l'une envers
l'autre des sentiments de méfiance.
L'AMOUR UNIVERSEL
Par amour universel (bac ai), nous entendons l'amour
sincère et miséricordieux de tout ce qui
a vie. C'est la fraternité envers tous les hommes sans distinction et la bonté
envers tous les membres du règne animal et du règne végétal.
I. - FRATERNITÉ HUMAINE
Toutes les religions sont d'accord pour reconnaître
l'Unité Divine, qu'elles conçoivent chacune selon le degré de leur évolution
spirituelle. Que les hommes soient une émanation divine selon les unes, ou le
résultat d'une création selon les autres, il n'en demeure pas moins vrai qu'il
proviennent tous d'une même source spirituelle unique que le langage humain,
pour l'exprimer, a plus ou moins imparfaitement appelée : Dieu, Brahma,
Jéhovah, Ngoc Hoang Thuong De, etc...Partant de ce principe, nous en arrivons à
proclamer que tous les hommes sont frères, quelle que soit la race à laquelle
ils appartiennent. Comme tels, ils ont les uns à l'égard des autres, des
obligations, des devoirs qui découlent de la fraternité. Qu'est-ce que la
fraternité ? C'est le lien d'amour, qui lie entre eux tous les hommes reconnus
comme membre de la famille universelle. Mais dans la société humaine
actuellement si divisée, la fraternité, qui devrait s'étendre à tous les hommes
sans restriction, est souvent contrariée par des sentiments d'orgueil ou
d'égoïsme. De-là, les préjugés de races, les haines et les luttes de castes,
source de tant de maux sous le poids desquels gémit l'espèce humaine.
Il importe donc, pour le bien de l'humanité meurtrie
et souffrante, que tous les hommes oublient leurs intérêts personnels pour ne
penser qu'à ceux de la collectivité ; qu'ils se tolèrent dans toutes les
manifestations de la pensée et de la foi; qu'il montrent enfin les uns aux
autres, la plus large indulgence. On pourra objecter qu'en l'état actuel de la
mentalité humaine, plus portée à l'égoïsme qu'à l'altruisme, parler de
fraternité universelle équivaudrait à rêver d'utopie. Cette objection est
malheureusement plausible et restera telle, tant que l'homme se concevra comme
corps plutôt que comme esprit "car,
dit Annie Besant, la matière croît en prenant autour d'elle, en s'appropriant
constamment ce qui lui est extérieur et en l'incorporant à ce qu'elle possède
déjà. Les choses matérielles s'usent et finalement périssent à l'usage, et
comme leur quantité est limitée, que ceux
qui en désirent la possession sont nombreux, les luttes s'élèvent entre
ces derniers. Le gain, la possession sont en effet la condition du sucès
matériel.
"Mais quand
l'homme commence à se concevoir comme esprit plutôt que comme corps, il
comprend que partager et donner sont les conditions de la croissance et de la
puissance. Les richesses spirituelles s'accroissent en effet à l'usage ; elles
ne périssent loit ; lorsqu'elles sont données elles se multiplient ; lorsqu'
elles sont partagées, leur possession, leur assimilation n'en deviennent que
plus complètes. La fraternité doit avoir ses racines dans l'esprit et se
répandre au-dehors, à travers les domaines de l'intellect et de l'émotion, pour
enfin s'affirmer dans le mode matériel. Elle ne pourra jamais être établie par
les lois imposées du dehors, elle doit triompher par l'Esprit s'épanchant du
dedans ".
Un jour, le roitelet Cung Vuong de la principauté de
So (Une des principautés de l'Empire du Milieu, du temps de Confucius) perdit
une arbalète à la chasse. Ses officiers d'ordonnance s'apprêtaient à aller la
chercher, lorsque Cung Vuong les emprêcha en leurs disant : "A quoi bon la
chercher? Sachez que nous en perdons rien à ce qu'une arbalète égarée par un
habitant de So soit bientôt retrouvée par un autre habitant de la même principauté".
Confucius, ayant appris
ces paroles, les commenta: "Quelle limitation regretable dans
les sentiments de fraternité de Cung Vuong ! N'aurait-il pas mieux fait de dire
: un homme a perdu une arbète et un autre homme la retrouvera". Ainsi exprimée, la conception de
la fraterniré humaine par le grand philosophe chinois apparaît bien plus belle,
plus saisissante dans sa forte concision.
II. - BONTÉ ENVERS LES ANIMAUX
Puisque nous sommes tenus à des devoirs de fraternité
envers les hommes, qui sont nos frères dans la famille universelle, nous avons
égalements des devoirs de bonté envers les animaux qui, eux aussi, sont nos
frères encore arriérés sur la voie de l'évolution.
Nous devons donc soigner ceux qui sont dressés à notre
service, les traiter avec douceur et éviter de les faire souffrir inutilement.
Toute vie animale doit être respestée autant que possible; car, en y portant atteinte, nous retardons l'évolution de la victime.
Aussi tout Caodaïste concient de ses devoirs se soumet-il au régime végétarien
pour éviter de se faire complice des crimes multiples journellement commis au
préjudice de ses frères inférieurs.
"Entre la pitié
envers les bêtes et la bonté d'âme, dit Schopenhauer, il y a un lien étroit :
on peut dire sans hésiter, quand un invidu est méchant pour les bêtes qu'il ne
saurait être homme de bien ".
III. - BONTÉ ENVERS LES PLANTES
Nul n'ignore les services que nous rendent les arbres
de toute espèce. Bienfaiteurs silencieux de l'homme, ne blâmant ni son
ingratitude, ni sa cruauté, ils abritent indifféremment, de leur ombrage, tous
ceux qui viennent s'asseoir à leur pied, le voyageur fatigué aussi bien que le
bûcheron méchant. Le santal dit-on, parfume la hache qui le frappe.
Les plantes constituent une véritable pharmacie
naturelle où nous puissons toutes sortes de panacées propres à guérir nos maux.
Que de leçons de bonté et de sacrifice ne pouvons nous pas en tirer à notre
profit !
Les récentes expériences scientifiques de Sir Bose, un
savant de l'Inde, ont démontré que les plantes vivent comme l'homme, que
quelques unes, et particulièrement la sensitive, possèdent un système nerveux
plus sensible que le nôtre aux impressions physiques. Que pensons-nous alors de
celui qui s'amuse à casser une branche à un arbre ou à déraciner une plante ?
Si les nécessités de la vie matérielle nous obligent à user des végétaux, la
bonté que nous devons à l'égard de ces "candidats à l'animalité" nous
recommande de ne jamais les mutiler, ni les détruire inutilement.
LE SERVICE DU
PROCHAIN
Que de douceur, que de charme, la nature, dans sa
solitude, ne procure-t-elle pas à l'homme qui vit retiré ? Loin du monde dont
les séductions n'ont plus de prise sur lui, dans la tranquilité de sa retraite,
il purifie sa vie, calme ses passions et élève ses pensées vers l'Être Suprême.
Puis, dans le ravissement de la contemplation, où se révèle le sentiment de la
Divinité, il sent mieux enfin son origine céleste.
Telle est la vie intérieure que mènent les hommes
supérieurs, doués de grandes facultés, lorsque, leur mision terrestre
accomplie, ils aspirent au bien-être spirituel. Mais avant d'arriver à cette
étape élevée du pèlerinage de l'Humanité, le voyageur de la longue route, tout
en charchant à progresser, doit venir en aide à ceux qui tâtonnent encore
derrière lui.
C'est ainsi que tout Caodaïste, soucieux d'agir selon
ces principes d'humanité, doit en toutes circonstances, se vouer au service du
prochain. Poussé par le désir d'aider ses semblables, il se tient tout prêt à
apporter, soit par ses paroles, soit par ses actes, un baume aux misères
morales et sociales. Et, dans ses aspirations vers l'amour miséricordieux, il
tend toujours la même main secourable à tous ceux qui ont besoin de son aide.
Essuyant tous les affronts, d'où qu'ils viennent, demeurant sans haine parmi
ceux qui le haïssent, tout fidèle de la "Grand Voie", dignitaire ou
simple adepte, doit s'imposer la tâche difficile de travailler à gagner les
âmes à Dieu, à leur inculquer les enseignements du Dai Dao, basés sur l'amour
du bien et le culte du vrai.
Si à force de proclamer les vérités, il n'arrive pas à
convaincre les incrédules, du moins, il les aura ébranlés quelque peu. Et
alors, les doutes suscités en leur âme jusque-là incroyante, feront le reste...
C'est en s'appliquant au perfectionnement et au salut
des autres qu'il travaille aux siens propres, car les actes d'amour et de
charité, par un juste retour, constituent son seul viatique dans ses
pérégrinations vers le bonheur suprême. Puisque le service du prochain est
l'une des conditions indispensables de son propre salut, il a tout intérêt à
s'y appliquer avec autant de zèle que le lui permettent sa ferveur religieuse
et son avancement moral. Sans avoir la prétention de se poser en prédicateur, il doit cependant inciter particulièrement ses coreligionnaires
à la pratique du bien et de la vertu. Il peut y arriver, non pas par le vains
discours, mais en prêchant d'exemple et en conformant sa vie à la doctrine
qu'il professe. Si parfois il vient à faillir à cette tâche en s'écartant de la
voie qui lui a été tracée par le Grand Maître, il n'est que juste qu'on s'en
prenne à sa faiblesse ou à son inconséquence et non aux enseignements qu'il est
chargé de répandre, lesquels constituent toujours avons-nous besoin de le
répéter ? un idéal de paix et d'amour fraternel.
Il peut y avoir, dans le Caodaïsme aussi bien que dans
toutes les autres religions existantes, de faux dévôts et des fidèles dont la
foi n'est pas assez forte pour résister aux tentations de l'Esprit du Mal. Ce
sont là autant d'éléments malsains, qui déshonorent la religion à laquelle ils
appartiennent, et dont celle-ci gagnerait à se purger complètement.
CODE RELIGIEUX
PREMIÈRE PARTIE
Règlements relatifs à la vie
religieuse
Chapitre I
Du Corps Sacerdotal
Art. 1er - Au sommet
de la hiérarchie sacerdotale, est le Giao Tong, le frère aîné. Il a la mission
de guider, au nom de Dieu, les fidèles dans la vie religieuse et sociale. A lui
est dévolu le pouvoir de communiquer spirituellement avec les Esprits
Supérieurs ,pour leur demander des grâces en faveur des adeptes. Ceux ci
doivent obéissance à ses ordres.
Art. 2 - Après le
Giao-Tong, viennent les trois Chuong Phap, dont un pour chacune des
Trois-Branches (Tam Phai) de la Religion : Confucianisme, Bouddhisme et
Taoïsme.
Les Chuong Phap sont chargés de l'examen des loi
religieuses établies par le Giao-Tong ou proposées par les Dau-Su, avant leur
promulgation, qui ne peut être faite sans leur approbation unanime.
La publication des livres de prières et d'autres
ouvrages religieux est subordonnée à l'acceptation des trois Chuong Phap,
lesquels, par un examen approfondi, veillent à ce qu'ils soient de nature à ne
pas porter atteinte à la morale ni aux bonnes mœurs du pays.
Chaque Chuong Phap a son sceau particulier. Toute
décision ne peut être mise à exécution que frappée des trois sceaux.
Les Chuong Phap doivent éclairer le Giao Tong sur les
torts que celui-ci peut avoir. S'il se comporte contrairement aux principes de
la religion, ils ont qualité pour en saisir le Saint Tribunal.
Art. 3 - Les trois Dau-Su, dont un pour chaque branche, sont
chargés, sous les ordres du Giao-Tong, de la direction générale des fidèles.
Ils peuvent proposer des loi qu'ils soumettent à
l'approbation du Giao-Tong. Ils peuvent aussi demander la modification ou la
suppression de celles qui ne sont plus en harmonie avec l'état actuel des
choses.
Les décisions émanant du Giao-Tong doivent, en cas de
désaccord de celui-ci avec les Dau-Su, être retournées au premier, qui les fera
examiner par les Chuong-Phap aux fins de modification.
Les Dau-Su ont chacun leur cachet particulier, Tout
écrit officiel n'est valable que s'il est revêtu de l'empreinte de ces trois
cachets.
Art. 4 - Les trente-six Phoi-Su sont répartis en groupes de
douze. Chaque groupe est dirigé par un Chanh-Phoi-Su qui peut suppléer un
Dau-Su absent ou empêché, sans être pour cela nanti du droit de proposé la
suppression des lois.
Art. 5 - Les Giao-Su, au nombre de soixante-douze sont
répartis en groupes de vingt-quqtre. Ils sont chargés de l'enseignement
religieux et social des fidèles. Ils doivent prendre soin de ces derniers comme
le ferait un frère de ses cadets.
Les Giao-Su tiennent les contrôles des adeptes de leur
diocèse. Ils ont la mission d'aider à l'observance des formalités rituelles en
ce qui concerne le mariage et le décès.
Dans les grands centres, ils ont qualité pour officier
absolument comme les Dau-Su et les Phoi-Su.
Ils peuvent formuler des propositions tendant à la
suppression ou à la modification des lois susceptibles de porter préjudice aux
adeptes.
Art. 6 - Les Giao-Huu ont pour mission d'assurer la
propagande de la doctrine divine, ils peuvent proposer la réforme des
règlements en vigueur. Ils peuvent officier,quand ils desservent un oratoire
dans une province de peut d'importance.
Le nombre de Giao-Huu est invariablement fixé à 3.000
dont 1.000 pour chaque branche.
Art. 7 - Les Le-Sanh, choisis parmi les adeptes vertueux,
s'occupent des cérémonies cultuelles. Ils sont en outre chargés de procéder aux
cérémonies dites de "l'installation de l'autel divin" chez les
néophytes.
Il faut être Le-Sanh avant d'être admis à la dignité
sacerdotale.
Art. 8 - Les Chuong-Phap et les Dau-Su peuvent, par le
suffrage universel, aspirer concurremment les uns avec les autres aux fonctions
de Giao-Tong.
Toujours par voie d'élection, sauf investiture directe
par le Grand Maître, le grade de Chuong-Phap peut-être conféré aux Dau-Su;
celui de Dau-Su, aux Phoi-Su; celui de Phoi-Su aux Giao-Su; celui de Giao-Su
aux Giao-Huu; celui de Giao-Huu, aux Le-Sanh.
Les règlements précités, déterminant la formation du
corps sacerdotal, sont extraits des communications de Dieu.
Chapitre II
Des fidèles
Art. 9 - Toute personne qui sollicite son admission dans le
Caodaïsme doit être présentée au chef de paroisse par deux adeptes vertueux.
Ceux-ci doivent initier le catéchumène aux principes élémentaires de la
doctrine religieuse.
Art. 10 - Chaque néophyte, dans la journée même de son
inscription, doit jurer sa foi devant le maître autel. Il est tenu de connaître
parfaitement les prières et les loi de la religion.
Art. 11 - Le chef de paroisse ou son représentant, qui doit
être un dignitaire est tenu de venir chez le nouveau converti en vue de
présider aux cérémonies de "l'installation de l'autel divin".
Art. 12 - La conversion confère le titre d'adepte.
Les adeptes
sont de deux catégories:
1. - Ceux qui, ayant
encore des attaches avec le monde, suivent un régime végétarien partiel,
c'est-à-dire soit pendant six jours, soit pendant dix jours par mois. Ils sont
absolument tenus d'observer les "cinq interdictions" (Ngu gioi cam) et les autres lois
religieuses applicables à leur catégorie. Ce sont de simples adeptes,
appartenant au degré inférieur (Ha Thua).
2. - Ceux qui
suivant le régime exclusivement végétarien et se conforment, en plus des "cinq interdictions", aux "quatre principales
observances"
(Tu Dai Dieu Qui). Ils appartiennent au degré supérieur (Thuong Thua).
Art. 14 - Les adeptes du degré inférieur, ayant satisfait au
régime "des dix jours", peuvent être admis à recevoir les
premières notions de l'initiation dans des cellules dites de "méditation".
Art. 15 - Les dignitaires se recruitent parmi les candidats
appartenant au degré supérieur. Les adeptes de cette catégorie doivent laisser
pousser leur barbe et leur cheveux. Leurs effets d'abillement, simples et
modestes, sont en contonnade blanche ou teintée de la couleur symbolique de la
branche à laquelle ils appartiennent.
Chapitre
III
De la création des
paroisses
Art. 16 - Toute localité comptant plus de 500 fidèles est
érigée en paroisse avec son oratoire et son dignitaire.
Art. 17 - La création d'une paroisse est subordonnée à
l'autorisation du Giao-Tong sous l'autorité duquel elle est placée.
Art. 18 - Les adeptes doivent obéissance aux ordres et
commandements du chef de leur paroisse.
Art. 19 - Ils sont tenus de se réunir à l'oratoire les jours
de la nouvelle et de la pleine lune, tant pour assister aux grandes cérémonies que pour entendre les
sermons.
Art. 20 - Tout dignitaire desservant une paroisse doit y
célébrer l'office divin quatre fois par jour : à six heures du matin, à midi, à
six heures du soir et à minuit.
Une sonnerie de cloche annonce l'heure de chaque
cérémonie.
Chapitre
IV
Les cinq
interdictions
Art. 21 - Une fois convertie, tout fidèle doit veiller à
l'amélioration de son caractère et de sa conduite en observant les cinq
interdictions suivantes :
1. - Ne pas tuer les êtres vivants ;
2. - Ne pas être cupide, c'est-à-dire ne pas piller,
prendre de force, escroquer, emprunter avec intention de ne pas rendre, receler
une chose volée, garder des objets trouvés, s'approprier un bien au préjudice
d'un autre, se livrer aux jeux d'agent;
3. - Ne pas commettre d'acte de luxure, c'est-à-dire ne pas
jouir de la femme d'un autre, courir les filles perdues, pousser à des actes
incestueux, s'énamourer des belles femmes, exciter à l'amour par des paroles
cajôleuses.
4. - Ne pas faire grande chère, c'est-à-dire éviter toute
débauche de table, se garder de l'ivresse qui trouble la raison en même temps
que l'ordre public, ne pas penser au goût des boissons enivrantes, ni à celui
des mets recherchés.
5. - Ne pas pécher en parole, c'est-à-dire ne pas tromper,
altérer la vérité, se vanter, parler des
torts d'autrui, se moquer des autres, pousser à la haine et au procès,
prononcer des paroles injurieuses, blasphémer contre la religion, manquer à la
parole donnée.
Chapitre
V
Des quatre
principales observances
Art. 22. - La pratique de la vertu et la rectitude de la
conduite doivent avoir pour base les quatre principales observances mentionnées
ci-après ;
1.- Obéir aux ordres de ses supérieurs, accepter sans
honte les bonnes suggestions de ses inférieurs, se montrer poli envers tout le
monde, reconnaître franchement ses torts et s'en repentir ;
2. - Ne pas tirer
vanité de ses talents, s'oublier pour les autres, les aider à pratiquer la
religion, se garder des rancunes personnelles, ne pas cacher les mérites des
sages ;
3. - Être d'une
honnêteté absolue dans les questions d'argent, ne pas manquer de convenances à
l'égard des supérieurs. Que les premiers qui ont quelque chose à enseigner aux
seconds, ne le fassent
pas avec hauteur; que
ceux-ci, qui ont à déconseiller certains actes à leurs supérieurs, ne le
fassent pas irrévérencieusement.
4. - Vis-à-vis d'un
supérieur, garder toujours une attitude respectueuse, qu'il soit présent ou
absent. Ne pas assister indifférent aux discussions qui s'élèvent entre
colerigionnaires. Ne poit placer son intérêt personnel personnel au-dessus de
l'intérêt général. Par soumission aux lois de la religion, ne pas contrarier
ses supérieurs, ni désobliger ses inférieurs par une opinion trop personnelle.
Chapitre
VI
De l'enseignement
Art. 23. - Il sera créé dans la religion, des écoles pour
l'enseignement classique et religieux.
Art. 24. - La méthode d'enseignement aisi que l'organisation
des écoles feront l'objet de dispositions spéciales.
Art. 25. - Ne pourront être candidats à la dignité sacerdotale
que ceux qui, indépendamment d'autres conditions, auront reçu le diplôme
d'études délivré par ces écoles.
Chapitre
VII
Des sanctions
Art.26.- Ceux des adeptes qui, pour des péchés
véniels, auront enfreint les présents règlements, se verront infliger par leur
chef de paroise, une sanction morale consistant à se mettre à genoux pendant
tout le temps que mettent une ou plusieurs baguettes d'encens à se consumer,
soit à réciter, dans la même attitude des prières en signe de repentir.
Art.27.- En cas de récidive ou pour des péchés plus
graves, les coupables seront défférés au conseil de discipline.
Ce conseil comprendra :
1. - Dau Su ou un
Phoi Su de la branche à laquelle appartiendra le pécheur, président;
2. - Deux dignitaires appartenant respectivement aux deux
autres branches, membres.
Ce conseil peut prononcer l'excommunication du
pécheur.
Art. 28. - Tout différend entre adeptes même concernant la vie
sociale, doit être tranché à l'amiable
par leur chef de paroisse.
Art. 29. - Tout dignitaire qui aura enfreint les règlements
religieux sera jugé par le "Conseil des Trois Doctrines".
Art. 30. - Ce conseil sera présidé par le Giao-Tong assisté des
trois Chuong-Phap, membres. Le Dau-Su de la branche à laquelle appartiendra le
pécheur établira le réquisitoire. Un dignitaire du Hiep-Thien-Dai (Corps des
Médiums) assurera la défense.
Art. 31. - Ce conseil peut prononcer la rétrogradation ou
l'excommunication du dignitaire coupable.
Chapitre
VIII
De la promulgation
des règlements
Art. 32. - Il est accordé aux adeptes un délai de six mois, à
dater de la publication des présents règlements pour leur permettre de s'y
conformer strictement. Toutefois, un délai :
1. - d'un an est
accordé aux fidèles pour leur permettre de renoncer aux professions proscrites
par les règlements ;
2. - de deux ans est
accordé aux dignitaires pour leur permettre de s'habituer au régime
exclusivement végétarien.
A moins de modifications ultérieures par le Maître
Suprême, toutes les prescriptions de l'ancien Code doivent être
intégralement observées.
* * *
DEUXIÈME
PARTIE
Règlement relatifs à
la vie séculière
Toute personne admise à pratiquer la religion
caodaïste, doit se conformer aux dispositions suivantes réglant sa vie
séculière :
Article premier.- Ayant un même maître, on doit se
considérer comme étant d'un même père. Il faut donc s'aimer, s'unir,
s'entr'aider, se témoigner une mutuelle sincérité, se soutenir dans la pratique
de la religion comme dans la vie sociale.
Art. 2. - Entre coreligionnaires, oublier toute haine
antérieure, éviter tout sentiment de jalousie, tout acte de rivalité ainsi que tout motif de procès; se faire des concessions
réciproques en vue d'une en tente parfaite ; en cas de dissention, s'en référer
de plein gré à l'arbitrage du chef de paroisse.
Art. 3. - Observer les Trois-Brides (Tam-Cang) et les
Cinq-Relations (Ngu-Thuong) qui sont à la base de la doctrine confucéenne.
Homme, on doit pratiquer essentiellement : la piété filiale, l'amour fraternel,
la fidélité, la politesse et la probité. La femme doit observer
particulièrement les Trois Conditions (Tam-Tung) inhérentes à son sexe : jeune,
on doit être sous la puissancepaternelle : mariée, se soumettre au droit
marital ; veuve, s'en rapporter à ses fils. Elle doit en outre acquérir les
Quatre-Qualités (Tu-Duc), requises pour le ménage (cong), le maintien (dung),
le langage (ngon) et la conduite (hanh).
Art. 4. - Dans ses relations sociales,tout adepte doit avoir
en vue : la conciliation, la douceur, le
respect, la modestie et la condescendance.
Art. 5. - Les coreligionnaires doivent entretenir les uns avec
les autres de bonnes relations, resserer les liens de solidariré. Le décès et
le mariage sont autant d'occasions d'assistance mutuelle que tout adepte,
vivant encore dans le monde, ne doit pas négliger.
Art. 6. - Le mariage étant l'acte le plus important de la vie,
se marier entre coregionnaires est obligatoire. L'union des fidèles avec des
personnes étrangères à la religion n'est tolérée qu'au cas où celles-ci
consentent par avance à se convertir au Caodaïsme.
Art. 7. - Huit jours avant les cérémonies nuptiales, un ban de
mariage doit être affiché à l'oratoirede la paroisse de chacun des deux futurs
époux, par les soins du chef de chacune des parties intéressées afin d'éviter
toute contestation ultérieure.
Art . 8. - Après les cérémonies nuptiales, les nouveaux mariés
doivent se présenter à l'oratoire le plus proche pour recevoir le
"sacrement du mariage".
Art. 9. - A partir de promulgation du présent code, il est
défendu aux fidèles de prendre une concubine. Toutefois, la mort de la femme donne
au mari le droit de convoler en secondes noces.
Si la femme n'a pas d'enfant pour assurer à son mari
sa postérité, celui-ci est autorisé à prendre une concubine sous réserve d'en
obtenir le consentement spontané de la première.
Art. 10. - Sauf le cas d'infidélité de la femme ou
d'irrévérence de sa part à l'égard de ses beaux parents, le divorce est
expressement interdit.
Art. 11. - Il doit être donné aux nouveaux-nés un parrain et
une marraine, qui prendraient soin d'eux au cas où ils viendraient à être
orphelins.
Art. 12. - Un mois après sa naissance, tout enfant doit être
présenté à l'oratoire du lieu pour recevoir le "sacrement du baptême"
en même temps pour être inscrit au régistre de naissance de la paroisse.
Art. 13. - Les parents sont tenus d'envoyer leurs enfants, dans
la période comprise entre 6 et 12 ans, à une école caodaïste où ils recevront
l'enseignement classique et religieux.
Art. 14. - Les coreligionnaires de chaque paroisse doivent, en
cas de décès d'un des leurs, participer à ses funérailles en signe de
condoléances à l'égard de la famille éprouvée.
Chaque paroisse doit avoir son cimetière.
Art. 15. - Sur la demande de la famille en deuil, le chef de
paroisse doit, en compagnie des fidèles du lieu, se rendre à la maison mortuaire,
tant pour assister à la messe des morts, qui se célébrera conformément aux
presciptions du Nouveau Code religieux, que pour accompagner ensuite le mort à
sa dernière demeure.
Art. 16. - Les cérémonies funèbres ne doivent pas occasionner
de grosses dépenses, ni durer longtemps. L'usage de chars funèbres trop voyants
est formellement interdit.Seule, la couleur blanche est admise comme signe de
deuil. Point de festins pompeux, qui contrasteraient avec les démonstrations
pieuses que nécessite la circonstance.
Art. 17. - Les victuailles doivent être exclues du culte des
mort; seules, les offrandes à base végétarienne sont admises.
La musique rituelle, si l'on en fait usage, doit être
conforme aux prescriptions du Nouveau Code religieux.
Les vêtements de deuil doivent être conformes aux
modèles traditionnels.
Art. 18. - Les cérémonies pour le salut de l'âme, ont lieu le
81ème jour de la mort, ainsi que celle de la 1ère et de la 2ème années de
deuil, doivent se célébrer à l'oratoire du lieu du défunt. Sur la demande de la
famille, les fidèles de la place doivent prendre part au service des prières.
Art. 19. - Les fidèles de chaque paroisse viendront, s'ils le
jugent à propos, en aide pécuniairement à l'un des leurs que l'infortune aura
frappé.
Art. 20. - A compter du jour de la promulgation du présent
Code, il est formellement défendu aux adeptes d'exercer toute profession
pouvant porter atteinte à la vie animale ou aux bonnes mœurs.
Sont également interdits; la rédaction ou la
publication des ouvrages pornographiques, le commerce des liqueurs alcooliques,
de l'opium et de tout produit toxique capable de nuire à la santé morale et
physique de l'homme.
Ceux des adeptes exerçant les professions ci-dessus
proscrites, sont mis en demeure de les abandonner.
Art. 21. - Les adeptes doivent se vêtir avec économie, suivant
leur condition sociale ; il leur est recommandé l'emploi des vêtement en
cotonnade et la diminution graduelle de l'usage des soieries.
Art. 22. - Les adeptes doivent ramener à leurs devoirs ceux des
leurs, qui auront contrevenu à une ou plusieurs dispositions des articles
préciter.
En cas d'insuccès, ils
en saisiront leur chef de paroisse, qui interviendra pour rappeler les
contrevenants à l'ordre.
Art. 23. - En cas de récidive ou d'obstination dans leur
inconduite, ceux-ci encourront l'excommunication prononcée par le Conseil de
discipline.
Avis en sera affiché à l'oratoire intéressé.
* * *
TROIXIÈME
PARTIE
De la cellule de méditation
La cellule de méditation est le lieu où les fidèles sont
admis pour recevoir l'initiation
Tout adepte qui demande à y être admis doit se
conformer aux prescriptions suivantes :
Art. 1. - Il doit avoir satisfait à ses devoirs moraux
(Nhon-Dao) et au régime exclusivement végétarien pendant plus de six mois.
Art. 2. - Il doit être présenté par un adepte jugé plus
vertueux que lui.
Art. 3. - Toute communication écrite avec l'extérieur lui sera
interdite, sauf avec ses parents, à condition d'être lue d'avance par le
Supérieur de l'établissement.
Art. 4. - Il doit refuser l'accès de l'établissement é tout
invidu étrager à la religion, qu'il soit fonctionnaire ou parent d'adepte.
Art. 5. - Il doit s'interdire toute conversation avec les
personnes du dehors ; toutefois, il pourra recevoir la visite de ses parents ou
enfants, après qu'il en aura reçu l'autorisation du Supérieur.
Art. 6. - Il doit s'abstenir de chiquer du bétel, de fumer du
tabac et de manger quoi que ce soit en dehors des repas servis par
l'établissement.
Art. 7. - Il doit avoir l'esprit calme, la conscience tranquille. Il doit vivre en bon accord avec
ses camarades de cellule et éviter toute conservation à haute voix ; il doit
les aider dans la pratique religieuse.
Art. 8. - Il doit obéir à toutes injonctions du Supérieur et
pratiquer les exercices spirituels d'après les prescriptions horaires, qui lui
auront été fixées par ce dernier.
LA
RAISON MÉTAPHYSIQUE
DES
CINQ
INTERDICTIONS
Notre Code religieux prescrit aux adeptes de tous
ordres l'observance intégrale des Cinq Interdictions. Mais ce ne sont là que
des préceptes d'ordre purement moral. Nous essayons de donner aujourd'hui la
raison métaphysique de ces Interdiction en nous basant sur les enseignements
que nous avons reçu de motre Grand Maître.
I. - NE PAS TUER LES
ÊTRE VIVANTS
Tous les être, qu'ils soient du règne minéral,
végétal, animal ou humain, sont animés d'une étincelle divine, qui constitue un
centre de conscience. Tout ce qui a vie, vient de Dieu. Dieu est donc le Père
de la Vie. Aussi son amour pour tous les être vivants est-il sans bornes.
La Vie universelle se manifeste sur tous les plans du
Cosmos ; les êtres en qui elle se manifeste peuvent être comparés aux diverses
branches d'un arbre qui représenterait la source de cette vie : Dieu. Or,
chaque branche d'arbre doit attendre un temps déterminé pour porter des fleurs, qui renferment la
semence nécessaire à la production et à la multiplication de l'espèce. Ceuillir
une fleur en cours d'épanouissement, c'est donc l'empêcher de continuer son
évolution.
De même, tout être venu au monde est destiné à évoluer
en une période de temps déterminé d'avance. En portant atteinte àsa vie, on
entrave son évolution et l'on s'expose, de ce fait, à subir un terrible karma.
Et qui sait si cet être ne ne porte pas en lui l'essence d'une entité supérieure
envoyée en expiation ici-bas ?
Ne tuons donc aucune être vivant.
II. - NE PAS ÊTRE
CUPIDE
Lorsque Dieu créa
les hommes, il leur donna un corps astral fait à son image (C'étaient
les hommes de la première race (race adamique) symbolisés dans le Christianisme
par Adam.). Vivant d'abord de la vie
astrale, ils n'étaient pas astreints àla nécessité de se nourrir et de se
vêtir. Peu àpeu, cédant aux attraits du monde matériel,ils finirent par vivre
d'une existence matérielle. Ils sentirent alors le besoin de se nourrir ( C'est
ce qu'affirme probablement la Bible lorsqu'elleenseigne qu'Adam goûta au fruit
défendu.) de se vêtir et de s'adonner à la sensualité. Ainsi se produisit leur
chute dans la matérialité d'où naquit l'instinct de possession et de
domination.
Or,ils avaient reçu de Dieu tout les biens de la
terre, qu'il devaient se partager fraternellement. Mais, poussés par la
cupidité, ils se les disputèrent et se les approprièrent les uns au détriment
des autres.
D'autre part, Dieu leur avait également accordé un certain pouvoir
dont ils devaient user pour exercer les uns sur les autres un contrôle mutuel,
afin de se guider dans la voie de la Vertue divine. Mais entre les mains d'une
catégorie de puissants, ce pouvoir devint une arme de domination, qui
assujettit l'humanité à l'esclavage. Pour dominer autrui, que firent et que
font les hommes ? Ils emploient tous les moyens illicites pour y arriver, d'où
les luttes qui s'élèvent entre eux,établissant ainsi la loi du plus fort, en
violationde la justicedivine. Telle est la cause de la tragédie humaine.
Quaand la cupidité pénètre dans un cœur humain, elle
en dénature tous les sentiments.
Pénètre-t-elle dans une maison, elle en désorganise l'administration.
Pénètre-t-elle dans une nation, elle en corrompt le gouvernement.
Pénètre-t-elle enfin dans le monde entier, elle en écarte tous les Esprits
purs.
La cupidité est donc un grand péché à éviter.
III. - NE PAS FAIRE
GRAND CHÈRE
A. - Ne pas manger
de la chair animale.- Chaque être humain possède deux corps : un corps matériel
et un corps fludique, que nous appelons avec nos frères spirites occidentaux,
périsprit. Comme ce périsprit participe de la nature du corps matériel (D'après
Allan Kardec, la substance du périsprit est puisée dans le fluide universel,
qui le forme et l'alimente. Cette conception présente avec le nôtre une
contradiction apparente, du moins pour toute personne qui n'admet pas l'unité
de la matière.), on l'appèllent encore corps semi-matériel. Cette appellation
est d'autant plus juste que le périsprit, invisible à l'état normal, peut se
rendre parfois visible ainsi qu'en témoignent les phénomènes de matérialisation
réalisés dans les séances de spiritisme. Prenant exactement, telle une matière
en fusion jetée en moule, la forme du corps matériel qu'il interpénètre, il ne
peut être pur que si ce dernier, qui est intimement en rapport avec lui, est
également pur. Ses pouvoirs transcendants s'obtiennent par la purification
mystique des trois éléments constitutifs de l'homme (tinh, khi, than). Le
périsprit de tout ascète ayant atteint la voie (dac dao), ne peut aspirer à
l'immortalité s'il manque dans sa constitution l'un quelconque de ces éléments.
Ceux-ci doivent acquérir, pour permettre au périsprit de s'élever dans les
hautes régions célestes, un certain degré de pureté et d'affinité tel qu'il
leur permettre de s'identifier avec les fluides éthérés de ces plans supérieurs
(Tien Thien Khi). Mais ces fluides sont chargés d'électricité statique.
Si, en nous livrant à l'entraînement mystique, nous
mangeons encore de la chair animale, nous risquons d'incorporer à notre
périsprit des éléments impurs, qui entraventson ascension. De plus, ces
éléments impurs sont bons conducteurs d'électricité. Tout périsprit qui en est
chargé, ne peut s'élever au-delà de l'atmosphère terrestre, sans être détruit
par la foudre.
C'est pourquoi, il est expressément recommandé à tout
ascète un régime d'alimentation exclusivement végétarien.
B. - Ne pas boire d'alcool.- Pourquoi devons nous éviter de
boire l'alcool ?
Le corps physique de l'homme est constitué par une
masse considérable d'êtres vivants infiniment petits, que la science officielle
appelle des cellules, par comparaison avec les alvéoles des ruches d'abeilles.
Les organes qui en font partie intégrante résultent également de lagglomération
du groupement de ces cellules, élément constitutif de l'organisme. Or le
fonctionnement de l'organisme est dû à cette énergie vitale (Khi en annamite,
prana en sanscrit.) qui anime le corps physique et le périsprit et qui est la
manifestation de la vie universelle dans le microcosme.
Cette introduction faite, examinons maintenant comment
l'alcool exerce ses effets nocifs tant sur le corps physique que sur le
périsprit.
1. - Effets nocifs
de l'alcool sur le corps physique.
Ingéré dans l'estomac, l'alcool est absorbé par le
sang qui le ramène ensuite au cœur dont, par ses propriétés excitantes, il
stimule le fonctionnement. La circulation se fait alors plus active, plus
pressante qu'à l'état normal, de sorte que le sang, arrivant aux poumons n'a
pas suffisamment de temps pour se purifier au contact de l'air aspiré. Il en
résulte une accumulation morbide de matières impures déposées par le liquide
rouge dans les cellules vivantes. Celles-ci, en s'en nourrissant, s'en trouvent
affectées et dépérissent de jour en jour. D'où l'affaiblissement du corps
physique, qui finit par se consumer. Tel est le cas de certains paralytiques dû
à l'abus de l'alcool.
2. - Effets nocifs
de l'alcool sur le périsprit.
Le peririsprit, disions nous, interpénètre le corps
physique et l'enveloppe de ses fluides. Son centre vital se trouve au cerveau
et son centre astral sur la fontanelle (Ne-Huon-Cung en Annamite, brahma
l'andhra en Sanscrit.). C'est sur ce dernier centre que le Producteur spirituel (Ho-Phap) reste
posté pour veiller sur l'égo de l'ascète jusqu'au jour où celui-ci aura atteint
la complète initiation.
Or l'effet excitant de l'alcool, qui s'étend jusqu'au
cerveau le congestionne, provoquant ainsi des troubles dans le périsprit, troubles
qui, au grand préjudice de la vie
ascétique, détruisent l'accord mystique qui s'est établi chez l'adepte. De
plus, pendant ces troubles périspritaux, celui-ci laisse la porte ouverte (le
centre astral) aux Esprits pervers qui, prenant possession de son corps et
exerçant leur empire sur lui, le poussent à des actes répréhensibles, qui
pourraient le conduire à la perdition.
C'est pourquoi notre Grand-Maître nous a formellement
défendu de boire de l'alcool.
IV. - NE PAS
COMMETTRE D'ACTE DE LUXURE.
Le corps de l'homme, disions-nous, est constitué par
une masse considérable d'êtres vivants. IL en est de même des végétaux dont il
se nourrit, tels que les légumes, les arbres fruitiers, les céréales, etc...,
car s'il en était autrement, comment pourraient-ils vivre, croître et conserver
leur fraîcheur ? S'ils se dessèchent et se désagrègent, c'est que la vie s'en
est retirée. Il faut remarquer que la cuisson n'est qu'un procédé antiseptique,
car les cellules vivantes des substances alimentaires, soumises ainsi à
l'action du feu, ne périssent pas à une si basse température. Les aliments,
après avoir subi dans l'estomac un premier travail d'élaboration, se
transforment en un liquide (chyle) qui, à son tour, se transforme en sang.Le
sang contient donc une grande quantité d'êtres vivants qui, par l'effet de la
conception, peuvent prendre une forme humaine (Ainsi s'explique la procréation
de l'espèce humaine).
La luxure entraînant l'élimination d'un grand nombre
de ces êtres, qui périssent ainsi avant
terme, est donc un grand péché que nous devons éviter sous peine de nous
attirer un cruel karma.
V. - NE PAS PÉCHER EN
PAROLES
La révélation nous apprend que Dieu prépose un
Esprit-guide à la garde de chaque vie humaine. Cet Esprit d'une impartialité
rigide, est, de par sa mission, sans cesse en relation avec les Etres parfaits
des hiérachies supérieures pour rendre, devant le Conseil des Seigneurs du
Karma (Toa Phan Xet), un compte aussi détaillé que possible de toutes nos
actions bonnes et mauvaises : C'est ainsi que le compte de tous les actes
humains, constitués en mérites et démérites, est inévitablement réglé par la
grande Loi Karmique. De plus, cet Esprit préposé à notre garde, a également
pour mission de nous instruire de ses inspirations. Les hommes, dans leur
pauvre et insuffisant langage, l'appellent Conscience. Or, avant que nous
cherchions à tromper les autres par nos mensonges, nous aurons déjà trompé
notre Conscience, c'est-à-dire notre Esprit-guide. Celui-ci enregistre non
seulement toutes nos actions, mais encore toutes nos paroles, fussent-elles non
encore traduites en actes, Car, aux yeux des Seigneurs du Karma, les péchés de
la langue, en temps que péchés, sont aussi punissables que ceux provenant d'un
fait accompli.
Aussi devons-nous observer la plus grande
circonspection dans nos paroles comme dans nos actes.
- FIN -
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